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CINEMANIAQ
25 février 2021

Chefs-d'œuvre méconnus des 80's - Episode III: "At Close Range"

Je vais achever cette série par un film cher à mon cœur qui me ramène au temps de l’innocence, des émotions cinématographiques naissantes et dont le souvenir était imprescriptiblement ancré dans ma mémoire lorsque je le revis pour la première fois en 2003. Cette année-là, le film fut (enfin !) édité en DVD dans une petite collection anonyme (avec Thief de Michael Mann, d’ailleurs).

Et malgré les 15 années écoulées depuis ma seule et unique vision, j’avais encore le souvenir précis de certaines images et dialogues…

At_close_range_affiche

Brad Whitewood Jr. (Sean Penn) vit dans une bourgade paumée de Pennsylvanie. Rien d’autre à faire que picoler ou fumer ici pour fuir un quotidien morose. Sans fric, sans but, sans avenir. Il vit avec son demi-frère, sa mère et sa grand-mère et ne fout rien de ses journées depuis qu’il a quitté l’école. Trois évènements rapprochés vont changer ce quotidien merdique en une tornade incontrôlable.

Sa rencontre avec Terry d’abord, jeune fille dont il tombe amoureux au premier regard puis la visite de son père qu’il n’a, semble-t-il, pas vu depuis des années. Et enfin, une dispute anodine avec le mec de sa mère qui ne supporte pas d’être privé de sommeil par les deux jeunes branleurs qui boivent de la bière en regardant la télé, vautrés comme deux crétins… Ejecté de la maison, Brad Jr. Décide d’aller passé quelques jours chez son paternel.

At close range_6

Deuxième film de James Foley, At Close Range (1986) ou Comme un chien enragé (*) en français, laissait augurer d’une brillante carrière pour ce jeune réalisateur américain. Ce ne fut pas le cas.

Tout commence donc comme une chronique sociale, une peinture peu engageante d’un territoire oublié au cœur des années 70, entre résignation, alcool et rêves (déjà) perdus. Et par la force d’un scénario réussi, à la mécanique assez implacable, l’histoire glisse vers le film noir aux accents de tragédie, non sans évoquer une romance adolescente, exempte de niaiseries et de fausses notes.

Comme le disait dans une remarquable concision Sir Alfred Hitchcock, un film consiste souvent en la rencontre d’un homme et d’une femme. At Close Range s’ouvre ainsi sur une rencontre et celle-ci sera déterminante dans le déroulement des évènements qui suivent.

At close range_5

Le film orchestre un magnifique affrontement père/fils et même si à l’évidence, Foley ne possède pas le talent brut de Mann ou de Friedkin, il a su tirer parti du très bon scénario de Nicholas Kazan (inspiré de faits réels) et de son superbe casting.

Sean Penn affiche de manière insolente le talent que nous lui connaissons aujourd’hui, apportant une belle nuance dans l’interprétation de ce jeune homme indompté en quête de reconnaissance paternelle. Christopher Walken, magnétique et effrayant (existe-t-il d’ailleurs un acteur aussi brillamment inquiétant ?) justifie à lui seul la vision du film. Tour à tour charmeur, séduisant, volubile et révélant en une fraction de seconde - sans effort apparent - son visage le plus sombre, sauvage, implacable et cruel. Il est juste magistral dans la scène du bar lorsque Sean Penn vient le solliciter devant le reste de la bande (je ne dis pas pourquoi) accompagné de sa petite amie. Sans aucun excès, le ton et le regard juste, il démontre qu’on peut montrer sa colère sans éclat de voix…

At close range_1

Enfin, la jeune Mary Stuart Masterson (19 ans à l’époque) se glisse parfaitement dans la peau de la jeune fille candide, amoureuse et capable de la ramener alors qu’il faut savoir la fermer dans certaines situations… Elle possède en outre une fraîcheur et un charme à tomber par terre (C’est d’ailleurs l’effet qu’elle me fît lorsque je vis le film pour la première fois !) qui sied vraiment à son personnage. La pauvre Terry va se trouver être la cause de bien des ennuis pour le jeune Brad Jr. et ils paieront un prix élevé pour leur désir d’émancipation.

Tout n’est certes pas parfait et quelques tics formels viennent assombrir légèrement le tableau. L’utilisation de ralentis et une scène à la complaisance un peu douteuse ne sauraient cependant gâcher le très beau travail effectué pour l’ensemble du film : photographie, musique, montage. La mise en scène est sobre, fluide, sans fioritures (hormis ce que je viens d’évoquer) et réussit finalement à faire cohabiter plusieurs genres dans un ensemble qui affiche toujours une belle cohérence. La bande originale nous rappelle que nous sommes en 1985, offrant de jolies variations autour du titre Live To Tell signé Patrick Léonard et interprété par Madonna. Jamais envahissante bien que très présente, la musique colle à l’ambiance du film et apporte une touche « tragico-mélancolique » appréciable.

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Finalement, après avoir frayé pendant 90 minutes son chemin entre romance, tragédie, film noir et drame familial, James Foley nous offre un dernier quart d’heure de haute volée, intense et plein de rage, porté par un duo père / fils de « first class ». Brillant.

J’aime profondément ce film pour les émotions et les sentiments complexes qu’il véhicule sans manichéisme. J’ai été marqué par sa vision et je ressens toujours les sentiments du jeune garçon que je fus lorsque je le revois. De là à dire que votre serviteur est un sentimental, un peu nostalgique, il n’y a qu’un pas…que je vous laisse franchir !

James Foley ne retrouvera jamais la recette magique lors de ses films suivants, malgré des scenarii intéressants et de grands acteurs à diriger. Il basculera petit à petit vers la réalisation d’épisodes de séries TV, comme House of Cards, pour finalement choir à la réalisation de 50 nuances plus sombres (2017) et 50 nuances plus claires (2018)…

Cinemaniaq

(*) Contenu Additionnel :

En passant, une fois que vous aurez vu le film... Cherchez la signification de At Close Range et évaluez la pertinence du titre français par rapport au titre original !

De même que pour Thief (1981) et To Live and Die in L.A (1985), At Close Range a bénéficié du travail éditorial opéré par Carlotta Films qui offre un écrin digne de son rang et une restauration de belle facture à cette pépite 80’s.

En plus du film, on trouve un affiche originale, le dossier de presse d’époque et des photos du tournage.

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